Yaoundé, 23 octobre 2024 (CAPnews) – La manipulation de photos et de vidéos est une pratique de longue date. Cependant, ce n’est que récemment qu’elle a été influencée par des contenus générés par l’intelligence artificielle (IA). Les avancées rapides dans ce domaine permettent un réalisme impressionnant, et ces manipulations peuvent désormais être réalisées à domicile à l’aide d’un ordinateur personnel équipé de logiciels open source accessibles au grand public. Le produit final peut facilement être partagé et diffusé en ligne. Olivier Lascar, auteur de « Deepfake, l’IA au service du faux » aux éditions Eyrolles, explore ces thèmes avec un style dynamique malgré la complexité du sujet. Il retrace l’origine du terme « deepfake », apparu sur les forums de Reddit à la fin de 2017, bien avant l’essor de technologies comme ChatGPT ou Dall-E. À l’époque, les images artificielles n’étaient pas générées à partir de descriptions en langage naturel, mais grâce à une méthode nommée réseaux génératifs antagonistes (GAN), élaborée en 2014 par Ian Goodfellow, un doctorant de l’université de Montréal, qui travaille aujourd’hui chez DeepMind, la division d’IA de Google. Bien avant que le terme « deepfake » ne soit inventé, une équipe allemande avait déjà réussi à faire prononcer des discours fictifs par des personnalités en synchronisant leurs mouvements des lèvres avec les paroles modifiées dans des séquences vidéo. Ce projet, Face2Face en 2016, laissait entrevoir des possibilités inquiétantes pour les manipulations politiques. Trois ans plus tard, Vincent Nozick, chercheur interviewé par Sciences et Avenir, soulignait déjà un « problème de société ».
En effet, que ce soit pour le conflit en Ukraine, la campagne présidentielle américaine de 2024 ou des escroqueries vocales, les deepfakes commencent à brouiller la frontière entre réalité et fiction. Le livre « Deepfake » dresse un panorama de l’histoire de l’IA à travers le prisme du traitement de l’image. Il aborde des fondamentaux tels que l’apprentissage automatique et par renforcement, ainsi que l’opposition entre IA statistique et symbolique. Cet ouvrage illustre ses propos avec divers exemples et références culturelles, évitant les clichés habituels comme ceux de Matrix ou Philip K. Dick qui tendent à détourner la réflexion des réalités techniques actuelles.
Le deepfake est désormais considéré comme étant dans une « ère industrielle », selon Olivier Lascar. Cette époque est marquée par des mystifications massives amplifiées par les algorithmes des réseaux sociaux, où le contenu faux ou choquant génère des engagements profitables aux plateformes telles que YouTube et Meta. Dans sa conclusion, le livre explore les moyens techniques de lutter contre cette vague de désinformation. Lascar a discuté avec plusieurs experts — chercheurs, ingénieurs, et spécialistes en cybersécurité — et reste conscient que la lutte est loin d’être gagnée