Yaoundé, 07 juillet 2025 ( CAPnews) – Il est important de rappeler que Diy-Gid-Biy présente une candidature autonome, bien distincte du site nigérian Sukur. Cette orientation stratégique, validée par l’ICOMOS en 2024, reconnaît le caractère exceptionnel de ces ruines qui pourraient devenir le premier site culturel camerounais inscrit à l’UNESCO. Un enjeu d’autant plus crucial que l’état de conservation, classé « vulnérable », nécessite une intervention urgente. Le mur nord-est de DGB-1, fissuré sur 12 mètres, menace de s’effondrer sous l’effet conjugué des pluies diluviennes et des racines invasives de figuiers sauvages. « Chaque mousson emporte des fragments d’histoire irremplaçables », alerte le géologue Dr. Datouang Jean-Marie de l’Université de Maroua, dont l’étude révèle une érosion accélérée de 3,7% par an depuis 2020.
Le terrorisme et l’économie de survie : un cercle vicieux
Dans l’Extrême-Nord camerounais, l’ombre de Boko Haram transforme la conservation en défi sécuritaire. Après l’attaque de Mondossa en 2020, où 80% des habitations furent incendiées, les populations déplacées ont puisé dans les ruines DGB pour reconstruire : près de 200 blocs de pierre ont été prélevés sur le site DGB-8. « Quand votre enfant dort à la belle étoile, la protection du patrimoine devient un luxe », confie un habitant de Mudukwa. Cette pression humaine s’aggrave avec l’afflux de 12 000 déplacés internes entre 2021 et 2023, augmentant les défrichements sauvages aux abords des terrasses archéologiques. Pourtant, paradoxalement, les gardiens traditionnels mafa maintiennent les rites sacrificiels, ultime rempart spirituel contre la dégradation.

Agriculture et modernité : la bataille silencieuse
Le plan de gestion 2023-2028 identifie l’expansion agricole comme menace principale. Les images satellitaires montrent que 40% des terrasses tampons ont été converties en champs de mil depuis 2015. À Kuva, des paysans creusent des silos dans les plateformes de DGB-2, ignorant que ces structures datent du XVe siècle. Plus insidieuse encore, l’invasion architecturale : 17% des villages périphériques ont construit des maisons en parpaings et tôle ondulée, créant un « effet de cicatrice » dans le paysage minéral. Ces matériaux industriels dénaturent l’harmonie visuelle du site.
La course contre la montre avant le 11 juillet 2025
Face à ces périls, l’État camerounais a lancé un plan d’urgence doté de 1,2 million d’euros :
Sentinelles patrimoniales : 23 jeunes Mafa formés à la surveillance anti-pillage
Le classement UNESCO serait un catalyseur décisif : « C’est notre seule chance d’obtenir des fonds internationaux pérennes », insiste le ministère camerounais des Arts et de la Culture. Si Diy-Gid-Biy est choisi, il deviendrait le 48e site africain classé au titre culturel et le premier du Cameroun après la Réserve de faune du Dja et la Tri nationale Sanga partagée avec le Congo et la République centrafricaine, qui sont des sites purement naturels. Un symbole fort pour tout un continent.
Stabilisation des murs par des techniques de pierre sèche traditionnelle (projet avec l’École de Chaillot)
Zones tampons réglementées interdisant toute construction moderne dans un rayon de 500 mètres.
Prochain article : Diy-Gid-Biy et Carnac : un duel planétaire pour la mémoire humaine
